Changer de métier pour changer de vie

C.Negroni2La sociologue Catherine Négroni a mené l’enquête pour comprendre ce qui pousse à vouloir changer d’emploi. Des réponses à découvrir dans son livre Reconversion professionnelle volontaire. Interview.

TPC.com : Peut-on affirmer que le désir de reconversion gagne du terrain ?
Il n’y a aucune empreinte statistique approfondie ni de construit théorique sur le sujet. Partant du constat que les tentatives de reconversion professionnelle volontaire se multiplient, notre enquête s’est intéressée à la mobilité des personnes qui veulent changer d’emploi et souhaitent entreprendre une démarche dont l’objet principal est la recherche de soi et la quête de sens afin de changer de vie. Pourquoi certains font part de velléités de changement et en restent à ce stade alors que d’autres au contraire passent à l’étape suivante ?

reconversion-professionnelle-volontaireTPC.com : Quels motifs poussent une personne à vouloir changer ?
Un événement, une rencontre… Face à une perspective de restructuration, alors qu’ils ne sont pas forcément menacés, des salariés ne veulent pas attendre de savoir ce qu’il adviendra et anticipent une situation de risque. Dans le même temps, d’autres attendent dans l’angoisse. Certains souffrent d’une trop forte pression au travail. Cela peut aller jusqu’à les empêcher de se sentir impliqué de manière sereine. Autres exemples : un manque de reconnaissance ou l’absence de promotion, l’intensification des tâches ou leur démultiplication qui ne fait plus sens pour la personne. L’arrivée d’un collègue peut aussi entrainer des difficultés. Mais au delà de la sphère professionnelle, la conjonction d’éléments en lien avec la sphère privée entraine parfois l’envie de passer à l’action.

TPC.com : Combien de temps peut durer la phase avant le passage à l’acte ?
Supporter une situation inconfortable ne dure qu’un temps, alors on se désengage, on se désinvestit. Un projet de reconversion se mûrit dans le temps. La décision se prend souvent après une phase de latence d’où émerge le sentiment qu’il n’y a pas d’autre solution. Entre la gestation et le moment de la formulation du désir de reconversion, il peut se dérouler de six mois à un, voire deux ans. L’individu va regarder le monde autrement et se tourner vers d’autres horizons. Un temps d’observation qui précède la prise de conscience de ses propres ressources et un travail qui permet de revisiter sa propre trajectoire, son parcours de vie. La reconversion est une seconde chance de revenir à un projet initial.

TPC.com : Comment concrètement mettre en acte son envie de changement ?
Les salariés vont notamment chercher des portes de sortie possibles dans le cadre de leur emploi. Peuvent-ils par exemple bénéficier d’une formation ? Ils tentent aussi d’investir la sphère non professionnelle afin d’initier la phase de mobilité : association, loisirs…

TPC.com : Et quand on s’engage sur une nouvelle voie qui ne peut finalement pas aboutir, que se passe-t-il ?
Si des personnes se trouvent confrontées à un problème incontournable, l’allergie à un produit indispensable pour exercer un métier par exemple, soit ils interrompent la démarche ou alors ils réajustent le projet. Face au principe de réalité, l’individu prend lui-même la décision de bifurcation. Comme ce sont eux qui réajustent, il n’y a donc pas de déception.

Reconversion professionnelle volontaire, Catherine Négroni, éd. Armand Colin


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